Recueil des informations des patients Covid-19 et secret professionnel

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Recueil des informations des patients Covid-19 et secret professionnel

Depuis la fin du confinement, les autorités publiques rivalisent d’idées pour trouver des solutions afin d’éviter que l’épidémie s’intensifie de nouveau.

C’est ainsi que le 30 avril dernier, le Directeur Général de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie a demandé aux médecins généralistes de veiller à ce que les patients atteints du Covid-19 qu’ils prennent ou prendront en charge soient identifiés et puissent à leur tour désigner les personnes qui seraient entrées en contact avec eux.

Par décret n°2020-551 du 12 mai 2020 relatif aux systèmes d’information mentionnés à l’article 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions, le Gouvernement a précisé les informations essentielles à recueillir afin d’identifier les potentiels nouveaux clusters.

Parmi ces informations figurent notamment :

  • les noms, prénoms du patient,
  • son âge, sexe,
  • son numéro de téléphone, adresse,
  • sa profession,
  • le lieu public fréquenté (EHPAD, établissement de santé, crèche…)
  • ou encore les personnes vivant avec le patient…

Ces informations sont par la suite transmises à une plateforme gouvernementale et sont accessibles à d’autres médecins, aux professionnels travaillant dans des laboratoires de biologie médicale ou aux pharmaciens. Elles sont également consultables par les agents de l’Agence Nationale de Santé Publique, de l’Assurance Maladie, de la Direction de recherche et des études de l’évaluation et des statistiques du ministère chargé de la santé (DREES), du service de santé des armées.

Dans cette dernière hypothèse, les informations font alors l’objet d’une « pseudonymisation » afin d’assurer la confidentialité de l’identité des personnes en supprimant les nom, prénom des intéressés, numéro de répertoire national d’identification des personnes physiques, adresse et coordonnées téléphoniques ou électroniques.

Si le Gouvernement a prévu cette pseudonymisation (suite à la décision du Conseil Constitutionnel 2020-800 du 11 mai 2020 sanctionnant les dispositions initiales) permettant la consultation des données par des non-médecins, ce tracking fait toujours l’objet d’une vive contestation par les syndicats des médecins généralistes et par l’Ordre des médecins qui voient une violation du secret médical protégé par les articles L.1110-4 et R.4127-4 du Code de la santé publique

Rappelons que le secret médical est absolu. Il ne peut y être dérogé que dans certaines situations bien précises. Au titre de ces dérogations, est prévue l’obligation pour les médecins de déclarer certaines maladies (choléra, peste, rougeole…). Or, le Covid-19 ne fait pas partie de la liste des 34 maladies à déclaration obligatoire.

C’est pourquoi, une grande majorité des médecins ne souhaite pas participer à ce tracking mais aimerait que ce soient les patients qui s’identifient eux-mêmes sur cette plateforme (l’efficacité de cette mesure risque alors d’être mise à mal car il est permis de douter de l’action directe des patients…).

Rien ne permet à ce jour de garantir l’efficacité du dispositif.

Caroline KAMKAR, Avocat au Barreau de Lille, Docteur en Droit.

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