Prescriptions hors AMM et responsabilité des médecins prescripteurs

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Prescriptions hors AMM et responsabilité des médecins prescripteurs

Si la prescription hors autorisation de mise sur le marché (AMM) n’est pas elle-même interdite aux médecins, ces derniers doivent cependant respecter certaines conditions.

En premier lieu, avant de prescrire hors AMM, le médecin prescripteur doit s’assurer qu’il n’y a pas d’alternative médicamenteuse appropriée disposant d’une AMM ou d’une ATU (autorisation temporaire d’utilisation) et que :

  • Soit l’indication ou les conditions d’utilisation considérées aient fait l’objet d’une recommandation temporaire d’utilisation (RTU) établie par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ;
  • Soit qu’il juge indispensable, au regard des données acquises de la science, le recours à cette spécialité pour améliorer ou stabiliser l’état clinique de son patient.

En deuxième lieu, le médecin prescripteur doit préalablement informer son patient :

  • que la prescription de la spécialité pharmaceutique n’est pas conforme à son AMM ;
  • de l’absence d’alternative médicamenteuse appropriée ;
  • des risques encourus et des contraintes et des bénéfices susceptibles d’être apportés par le médicament ;
  • des conditions de prise en charge, par l’assurance maladie, de la spécialité pharmaceutique prescrite.

En troisième lieu, le médecin prescripteur doit motiver sa prescription dans le dossier médical du patient et porter sur l’ordonnance la mention : « Prescription hors autorisation de mise sur le marché ».

Le non-respect de ces conditions peut engager la responsabilité du médecin prescripteur qui prescrirait hors AMM. En effet, une prescription hors AMM peut constituer à la fois :

  1. Une faute déontologique
    • L’article R.4127-8 du Code de la santé publique prévoit que « Dans les limites fixées par la loi et compte tenu des données acquises de la science, le médecin est libre de ses prescriptions qui seront celles qu’il estime les plus appropriées en la circonstance… » ;
    • L’article R.4127-32 du même code dispose que « (…) le médecin s’engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science (…) » ;
    • L’article R.4127-40 du même code précise que « le médecin doit s’interdire, dans les investigations et interventions qu’il pratique comme dans les thérapeutiques qu’il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié » ;
  2. Une faute civile (responsabilité civile du praticien libéral) ou administrative (responsabilité de l’établissement lorsque le médecin exerce à l’hôpital public, sous réserve que sa prescription ne soit pas assimilée à un acte d’une particulière gravité) ;
  3. Une faute pénale : Les articles 221-6, 222-19 et 223-1 du Code pénal sanctionnent tout manquement délibéré « à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement » (l’AMM pouvant être assimilée à un règlement).

Il est donc essentiel pour les praticiens de connaître l’ensemble des conditions à respecter lorsqu’ils envisagent une prescription hors AMM, pour sécuriser leur pratique professionnelle.

Maître Danièle GANEM-CHABENET, Avocat au Barreau de Paris

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