Refus de soins illégal et honoraires abusifs : un décret fixe la procédure et les sanctions
Poursuivant l’objectif d’un meilleur accès aux soins, la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi HPST, avait consacré l’interdiction de refus de soins et des pratiques abusives en matière d’honoraires.
Pris pour son application, le décret n°2020-1215 du 2 octobre 2020 vient préciser ces notions, rend effective la procédure applicable et détaille les sanctions encourues par les professionnels de santé.
Le refus de soins est ainsi défini comme « toute pratique tendant à empêcher ou dissuader une personne d’accéder à des mesures de prévention ou de soins, par quelque procédé que ce soit » dont le caractère discriminatoire s’apprécie par renvoi aux dispositions de l’article 225-1 et 225-1-1 du code pénal. À ces motifs généraux s’ajoute la prohibition de toute discrimination de patients au motif du bénéfice de la Couverture Maladie Universelle (CMU), de la Complémentaire Santé Solidaire (CSS) et de l’Aide Médicale d’Etat (AME).
Tout patient s’estimant victime d’un refus de soins illicite pourra dès le 1er janvier 2021 saisir le Directeur de la caisse locale d’Assurance maladie ou le Président du Conseil départemental de l’Ordre de la profession de santé concernée et déposer une plainte.
Des commissions mixtes de conciliation, composées de représentants de l’Assurance maladie et de l’Ordre au tableau duquel le professionnel est inscrit sont créées pour connaitre de ces litiges. À défaut de conciliation des parties, la procédure de plainte suit son cours devant les instances ordinales compétentes.
La procédure est toutefois différente en matière de dépassement d’honoraires, laissant la décision d’une sanction au Président de la caisse locale d’Assurance maladie. Si le décret évoque des honoraires n’excédant pas « le tact et la mesure », il précise immédiatement les critères devant présider à la fixation de ces honoraires.
Sont ainsi autant de critères analysés pour déterminer l’abus de dépassement :
- la complexité de l’acte,
- le temps nécessaire à sa réalisation,
- le service rendu au patient,
- la notoriété du praticien,
- le pourcentage d’actes avec dépassement d’honoraires,
- le montant moyen des dépassements dans le département ou la région.
Si les procédures diffèrent, les sanctions de ces pratiques convergent vers des peines d’affichage de la sanction mais surtout des pénalités pécuniaires pouvant être importantes :
- Jusqu’à deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale pour le refus de soins ou deux fois le montant du dépassement facturé pour le dépassement d’honoraires ;
- L’interdiction de dépassement pour une durée pouvant aller jusqu’à 3 ans et la suspension de la participation au financement des cotisations sociales en cas de récidive.
Un bilan de ces plaintes devrait être adressé annuellement au Ministre de la Santé et de la Sécurité sociale, au Défenseur des droits et aux Commissions d’évaluation des refus de soins.
Juliette RIBEIRO, Avocat au Barreau de Paris.