Loi anti-cadeau : les nouveautés du décret du 15 juin 2020 sur les avantages offerts aux professionnels de santé
Parachevant le dispositif de la loi anti-cadeau applicable aux industries et professions de santé, issu de l’ordonnance n°2017-49 du 19 janvier 2017 ratifiée par la loi n°2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, un décret en date du 15 juin 2020 et deux arrêtés pris au cours de l’été, le 7 août 2020, sont venus apporter un certain nombre de précisions attendues depuis longtemps.
C’est ainsi que le décret détermine notamment :
- les « personnes qui assurent des prestations de santé » qui sont soumises, au même titre que les entreprises produisant ou commercialisant un produit de santé, à ce nouveau dispositif.
- la nature et les conditions des dérogations à l’interdiction d’offres d’avantages (contenu de la convention, pièces à joindre,…),
- les modalités du régime de déclaration et d’autorisation des dérogations. On rappellera à ce titre que le dispositif d’avis ordinal préalable a été remplacé par un contrôle dont la nature dépend du montant des avantages visées dans la convention, soit :
- Si le montant est inférieur aux seuils fixés par arrêté : régime de déclaration de la convention signée (avec le cas échéant, les pièces jointes) à l’autorité compétente au plus tard 8 jours ouvrables avant la date d’octroi de l’avantage ;
- Si le montant est supérieur à ces seuils : régime d’autorisation préalable du projet de convention (avec ses pièces jointes, dont notamment l’autorisation de cumul d’activités) soumis à l’autorité compétente, qui se prononcera dans un délai de 2 mois à compter de la réception du dossier complet (délais plus courts prévus par le décret en cas d’urgence).
Il est précisé qu’en cas de refus, la personne assurant des prestations de santé a la possibilité de soumettre une convention modifiée dans un délai de 15 jours à compter de la notification du refus. Dans ce cas, l’autorité compétente disposera alors d’un délai de 15 jours pour prendre une nouvelle décision.
Le défaut de réponse dans les délais de 2 mois ou de 15 jours visés ci-dessus vaut autorisation tacite de la convention.
La déclaration ou la demande d’autorisation sont faites par téléprocédure auprès du Conseil National de l’Ordre concerné (si le bénéficiaire est un professionnel, une personne morale ou un étudiant se destinant à une profession relevant d’un Ordre) ou de l’ARS dans le ressort de laquelle la convention a été signée (dans les autres cas).
Quant aux deux arrêtés du 7 août 2020, ils fixent les seuils visés par le décret.
Le premier arrêté fixe les montants en dessous desquels les avantages en nature ou en espèces sont considérés comme d’une valeur négligeable. Ils ne sont donc pas soumis à une procédure d’autorisation ou de déclaration.
Pour que l’avantage soit considéré comme négligeable, son montant toutes taxes comprises (TTC), dans la limite de fréquences déterminées, ne doit pas être supérieur aux montants suivants :
Typologie | Montant maximum |
Repas et collation à caractère impromptu | 30 euros dans la limite de deux par année civile |
Livre, ouvrage ou revue, y compris abonnement | 30 euros par livre, ouvrage ou revue et dans une limite totale de 150 € par année civile |
Échantillon de produits de santé à finalité sanitaire | 20 euros dans la limite de trois par année civile |
Fournitures de bureau | 20 euros au total par année civile |
Autre produit ou service | 20 euros au total par année civile |
Le deuxième arrêté fixe, pour chaque catégorie de convention et de bénéficiaire, des seuils au-delà desquels les conventions doivent faire l’objet d’une autorisation préalable. Le montant de l’avantage est entendu toutes taxes comprises (TTC).
Ainsi, pour les avantages bénéficiant aux professions médicales ou professions d’auxiliaires médicaux, les seuils sont les suivants :
Typologie | Seuils |
Rémunération nette, indemnisation et défraiement d’activités de recherche, de valorisation de la recherche, d’évaluation scientifique, de conseil, de prestation de services ou de promotion commerciale | 200 € par heure, dans la limite de 800 € par demi-journée et de 2 000 € pour l’ensemble de la convention |
Dons et libéralités destinés à financer exclusivement des activités de recherche, de valorisation de la recherche ou d’évaluation scientifique | 5 000 € |
>Hospitalité offerte lors de manifestations à caractère exclusivement professionnel ou scientifique, ou lors de manifestations de promotion des produits ou prestations | 150 € par nuitée, 50 € par repas et 15 € par collation, et 2 000 € pour l’ensemble de la convention incluant le coût des transports pour se rendre sur le lieu de la manifestation. Les frais d’inscriptions aux manifestations peuvent être pris en charge en sus de ce montant, et doivent faire l’objet d’une demande d’autorisation à partir de 1 000 €. |
Financement ou participation au financement d’actions de formation professionnelle ou de développement professionnel continu | 1 000 € |
Pour les avantages bénéficiant aux étudiants, quelle que soit la profession à laquelle ils se destinent et la nature de la dérogation, les seuils sont les suivants :
Typologie | Seuils |
Rémunération nette, indemnisation et défraiement d’activités de recherche, de valorisation de la recherche, d’évaluation scientifique, de conseil, de prestation de services ou de promotion commerciale | 80 € par heure, dans la limite de 320 € par demi-journée et de 800 € pour l’ensemble de la convention |
Dons et libéralités destinés à financer exclusivement des activités de recherche, de valorisation de la recherche ou d’évaluation scientifique | 1 000 € |
Pour les avantages bénéficiant aux associations, les seuils sont les suivants :
Typologie | Seuils |
Rémunération nette, indemnisation et défraiement d’activités de recherche, de valorisation de la recherche, d’évaluation scientifique, de conseil, de prestation de services ou de promotion commerciale | 200 € par heure, dans la limite de 800 € par demi-journée et de 2 000 € pour l’ensemble de la convention |
Dons et libéralités destinés à financer exclusivement des activités de recherche, de valorisation de la recherche ou d’évaluation scientifique | 8 000 € |
Dons et libéralités destinés à une autre finalité en lien avec la santé | 1 000 € |
Dons et libéralités bénéficiant à des associations déclarées d’utilité publique, y compris ceux destinés à financer exclusivement des activités de recherche, de valorisation de la recherche ou d’évaluation scientifique | 10 000 € |
L’ensemble de ces dispositions entreront en vigueur le 1er octobre 2020.
On soulignera que les décisions de l’autorité compétente pourront être contestées devant les juridictions administratives.
Danièle GANEM-CHABENET, Avocat au Barreau de Paris