Le bilan partagé de médication, nouvelle mission du pharmacien d’officine
Prévu pour entrer en vigueur au 1er janvier 2018 par l’avenant n°11 à la convention pharmaceutique, le bilan partagé de médication a vu ses conditions et modalités de mise en oeuvre précisées par l’arrêté du 9 mars 2018 « portant approbation de l’avenant 12 à la convention nationale du 4 mai 2012, organisant les rapports entres les pharmaciens titulaires d’officine et l’assurance maladie », signé entre l’UNCAM, la Fédération des Syndicats pharmaceutiques de France et l’Union syndicale des pharmaciens d’officine.
Le bilan partagé de médication est un outil innovant dans la lutte contre la iatrogénie en ville et s’inscrit dans le développement actuel des activités de pharmacie clinique. Il permet en effet de prendre en compte la polymédication des séniors et de lutter contre le risque iatrogénique d’une population vulnérable aux effets indésirables de molécules administrées concomitamment. Il est une nouvelle opportunité tant pour le patient âgé, mieux pris en charge quant aux traitements pharmaceutiques, que pour le pharmacien, qui voit son rôle plus que jamais valorisé dans la prise en charge de la personne malade via les entretiens pharmaceutiques.
Voici ci-après les caractéristiques du bilan partagé de médication :
- Il s’agit d’un programme d’adhésion (en ligne sur le site amelipro.fr) du patient, consenti librement et formellement accepté par ce dernier, qui, pour sa mise en oeuvre, entend favoriser l’évaluation de l’observance et de la tolérance du traitement, les interactions médicamenteuses, le bon usage de l’administration par le rappel des conditions de prise et l’information du médecin prescripteur.
- L’accord du patient, sa liberté de choix du « pharmacien référent » et son droit d’en changer à tout moment, sont assurés.
- Les patients concernés par ce bilan sont les patients de 65 ans et plus avec au moins une affection de longue durée (ALD) et les patients à partir de 75 ans, sous traitement au moment de l’adhésion, pour lesquels au moins 5 molécules sont prescrites. Ceci pour une durée consécutive de traitement supérieure ou égale à 6 mois. Le critère de la chronicité est ici essentiel.
- Le bilan partagé de médication peut être réalisé à l’officine dans un espace de confidentialité ou directement chez le patient/en EHPAD. Il se compose de plusieurs étapes :
- La 1ère année on retrouve :
- Un entretien de recueil d’information en présence du patient,
- Une analyse des traitements du patient,
- Un entretien « conseil » en présence du patient,
- Un suivi de l’observance environ 6 mois après.
- L’année suivante il existe deux possibilités :
- En cas de nouvelle prescription d’un ou plusieurs nouveaux traitements, il sera nécessaire de réactualiser l’analyse initiale, de réaliser un deuxième entretien « conseil » et d’en assurer le suivi de l’observance 6 mois plus tard.
- En cas de continuité du traitement, il sera nécessaire de réaliser au moins deux suivis de l’observance dans l’année.
- La 1ère année on retrouve :
- En contrepartie des diligences accomplies par le Pharmacien, ce dernier bénéficie d’une rémunération autonome fixée à 60 euros la première année par patient inscrit dès lors que l’ensemble des étapes du bilan ont été réalisées ou lorsqu’au moins l’entretien de recueil des informations et l’analyse des traitements du patient assortie de l’information du ou des prescripteurs ont été réalisés. Les années suivantes, la rémunération sera fixée à 30 euros en cas de nouveaux traitements et à 20 euros en cas de continuité de traitement.
Un guide d’accompagnement des patients validé par la HAS, a été conçu pour aider les pharmaciens à appréhender au mieux la conduite des entretiens pharmaceutiques dans ce cadre. Il figure en annexe de l’arrêté du 9 mars 2018.
La France rejoint ainsi les pays comme le Canada, l’Espagne, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni ou la Suisse, qui ont déjà mis en place, en précurseurs, des bilans de médication.
Maître Thibault GONGGRYP, Avocat au Barreau de Marseille, Docteur en Droit, Chargé de cours magistral à la Faculté.